Elle se démultiplie dans ses angles pour qu’il
revienne dans ses bras ou sa voix – c’est la même chose.
Il dit que ses notes prennent forme ou pas,
mais elle donne toujours le rythme en fin de compte.
Dans le labyrinthe des lieux et des
rencontres, elle trace exactement la place et le moment de ses connaissances
primordiales : ils s’y retrouvent alors sans plus rien savoir d’autre.
Elle donne l’air et il ne le trouve pas
toujours quand ça monte ou qu’il parle en même temps : il s’essoufle mais
l’air ne manque pas.
Chaque fois, elle a sa justesse mais il
n’arrive jamais à dire pourquoi il tient à elle ou plutôt comment elle le tient
en voix.
Elle garde son énigmatique centre mais il le
trouve facilement chaque fois qu’elle lui fait connaître le théâtre d’une rencontre.
Elle survient quand il ne s’y attend pas et
cela demande quelques instants pour qu’il la retrouve comme jamais.
Peut-elle se donner en spectacle quand c’est
sa souffrance ? Alors il ne sait plus et laisse faire les autres pour
mieux la retrouver sans le masque de la douleur.
Ce qu’elle subit exige son écoute : ses
éclairs d’œil la retrouvent dans tous ceux qui n’ont pas encore de nom.
Il ne met pas les virgules là où il faudrait
et elle ne le laisse pas faire sauf quand elle veut écouter sa volubilité.
Juste ce qu’il faut, dit-elle à chaque fois
que le montage lui permet de multiplier ses lenteurs.
Comme sur une toile de fond, elle augmente les
épaisseurs du temps qu’il traverse dans sa phrase.
Sa déambulation dans les livres se perd aux
confins de sa déréliction : il n’a vraiment plus que son écho.
C’est dangereux de dire son dernier mot :
elle énumère ses cas et il multiplie ses motifs.
Elle traverse l’espace comme dans un plan
séquence pour qu’il prenne le plus d’air possible.
Il ne sait plus si elle rêve dans son écriture
ou si c’est son écriture qui la rêve.
La multiplication des voix fait tourner les
scènes où il danse avec elle sans arrêt : comme les enfants, il adore ce
vertige qui renverse le monde. Sa phrase s’envole ou finit dans les étoiles.
Il dit écrire dans son vivre et sa vie n’est
pas vraiment graphomaniaque : elle respire son souffle.
Elle va forcément se faire voir mais la scène
peut ne pas montrer ce qu’il veut voir.
Il cherche l’image sans décider du beau ou du
vrai : elle traverse sa matière en lui livrant ses symptômes.
C’est du tact qu’il lui a fallu pour trouver
dans ses dessins l’image de sa voix, c’est-à-dire son corps à neuf.
Ceux qui n’ont pas de nom reviennent sans
cesse dans sa voix et il essaie de les retrouver dans leur fuite en elle.
Elle est souvent en train de bouger quand il
cadre et c’est le fond qui garde son mouvement : entre-temps, il a essayé
de changer de focale.
C’est une histoire de l’œil qu’elle
renverserait en singularités de son écoute : il bataille avec son propre
racontage.
Il s’agit de faire le point : aller voir
ce qu’elle seule peut montrer quand il l’écoute enfin.
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