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Serge Ritman
Claire île (extraits)
Je n'ai rien appris. Alors tais-toi. Je n'ai rien à dire. Alors tais-toi. Il n'y a pas que dire dans parler, il y a te dire. Rien m'a épuisée. Je cherche un bout d'histoire. Tais-toi, tais-toi, tais-toi. Je ne peux pas, je ne veux pas me taire. Pourquoi? Quelque chose veut, parle, mais je ne comprends pas. Il n'y a rien et cela voudrait forcer le passage.
Caroline Sagot Duvouroux
I
comment dire tout ce qui nous arrive
vivre dans le mouvement de nous pour mieux respirer aller
vers tu m'as trouvé et je t'ai cherchée cache cachette vers
ciel et tout s'en trouve rompre les amarres à pleurer rire à
faire corps à corps jacob avec l'ange sans issue autre que nue
en appel d'agrandir tout l'écrire infini en plein coeur de vivre
et rouler au coeur des dunes hisser au long des écorces et tiges
de fleurs au fond des buissons écraser les mûres et rougir joues
renverser en grande douceur avec force incommensurable brassées
de baisers de bras de mains des yeux des seins des cuisses des pieds
et marcher sans savoir l'élan marcher le paradis en pleurant riant
à deux à nos nombreux infiniment les sembles nos poèmes vies
tu inondes d'ailes
chaque sans totalité
possible passage
continu de voix
le silence est entre nos lèvres il prend
tes yeux deux fermés où tombent délices
et tout à coup l'éclair ton sourire le bleu
ouvert plein ciel des deux yeux j'y fonds
c'est tous les doigts dans la bouche et le petit aux commissures
jusqu'aux paupières la langue tu penches et nous tombons vers
respire tout ce qui traverse en lèvres et en dents suffoque dans les bras tient tout le déséquilibre jusqu'au cou un doigt
la paume ferme la bouche qui mange en langue mouille et compte quoi des lignes des signes un verre d'eau en deux goulée la même d'une bouche l'autre coule jusqu'en bas dans le creux des cuisses ou bas ventre la paume a un petit ventre creux c'est faim de suivre un baiser qui peut s'arrêter au lobe en nuque respire et coule
comment me pencher encore quand tu penches
j'ai mal au ventre et tu montes c'est deux tiges
avec au bout deux bouches en lèvres tu m'enlèves
II
l'illuminée requête de voix vive
où je t'assigne
et ton refus serait
l'engloutissement
dans les baisers je parlais racontais explorais imaginais confondais c'étaient les arbres les feuilles le ciel les nuages c'étaient tes intérieurs nos dehors dedans
tu n'entendais pas seules tes lèvres écoutaient elles me comprenaient sans retenue
tu oubliais de me dire tu t'oubliais j'allais tomber nous tombions laisse et la foule nous contournait et je soulevais ta bosse de passagère ton équipage de poète des champs le sac à dos de ton air penché je l'alourdissais d'un baiser volé tu m'en volais dix à la fois tu oubliais de compter je te racontais mes oublis et nous perdions le fil de nos lèvres je te rejoignais dans le bain en nage ta lumière claire
en quel temps te revoir
de jour et nuit sous lèvres tu viendras
tomber je vais
tu me touches tout le jour
c'est nuit dans nos yeux
claires lumières
ma main a disparu d'écrire
l'as prise emportée où milieu des mers
quelle île la seule et comment les doigts dans tes lèvres
ça saigne ne vois le rouge qui coule en fil
tresse chevelure en courant de fleuve en delta
sable ocre est-ce eau claire
d'écrire arrachée décollée au bord
coupant de toi
tous ces baisers de bouche de doigts
je cours
après une armée suffira pas et peur au ventre mes soldats
c'est fable et je conte
je cours
elle ne se reprend pas donnée
où es-tu cette île de voix j'erre sans toit
pas plus mirage pas plus mer
noyé j'erre de nage
c'est plus sage n'écris pas lui dis
si tu l'as
mange !
j'ai lu tu disais
ne puis ne plus
à la vie à la nue – me disais mais mort s'en
plus puis encore plus
toujours ne ne déjà là comme arrêter tout commencer
toujours ne ne déjà lu déjà tu sans arrêt tu commençais
je te tue / tu me jus continue ad lib.
et nous fut (nous nous : fusions : combien d'étages je saute dans le ventre)
défaite même pas fête fi si
sans lys (lire yeux fermés le clair secret) cent - non mille et un(e)
pouvoir plus voir quels yeux restent
puissance de l'impuissance nuisance de lui – mille et un appels
lumière (plus d'étoile claire) vers plus sens - courir où
pis :
lui si ne su quoi ne ne
si lui ne quoi su elle ne
ne si lui si elle quoi ne
(c'est ici plus l'île plus)
c'est de hisse pas pisse à pousse ouste d'un ne ne
passe passe vers
ni n'est-ce
je tu ne ne nous
nus mise à
mortifier étouffer inhumer plus respir – choses pires
mais hisse issue belle : l'impossible
neige – ta clarté non ! tes étoiles
(pas fier rythmer ne ne en pas plus possible)
III
j'avais mis le doigt sous
l'aisselle – c'est bien la droite en bras du cou
elle me laisse
le sel et me mouille
tu disais je me change mais une robe tu l'avais
mise
de tous mes doigts et la langue suit sa coupe jusqu'aux doigts de pied – un seul
j'avais mis
le doigt
je compte les doigts petits cris très intérieurs je les écoute avec les lèvres ou c'est sur les dents voire le nez les paupières résistent
tu lèvres lèches lape loupe de plus près c'est jamais
assez sauf
glisser
le doigt ou tous mais sur un c'est fort c'est la pluie danaé
foutre l'amérique l'orénoque nioque nada rien rac
j'avais mis ça claque tout air – lettres finales en bouche j'aime sans compter les a que te fait le doigt
les sels
oui des ailes y poussent en doigts
au ciel
– nous tout mouillés
(porche de carnavalette tu grimpais en sévigné
ma viande livrée en correspondance
aux francs bourgeois et les toiles de desgrandchamps où sont passées les couleurs)
tu frémissais j'avais mis ton air
(trois fois)
tu m'orangeais je m'endocrinerai
pas crime :
crî-âme !
voilà une danse gonadesque (toutes glandes au galop)
oh ! vers (c'est comment pour toi ton air)
du ventre ça part tige et ni pal
ni pulpe ne reboirai autre que
ta pluie
si tant de baisers descendent de si haut
des anges tes lèvres déchues
toute orange la pharmacie délivre le coup
ou le poison, non : l'amour avalé
comme test en si
l’île
dans ton dos tu portes
sac lourd & si
l'appel c'était tomber
furies fureurs & peines poèmes
tu me penches entier dans
si claire
la nuque c'était l'île
mon cri ton râle
plein soleil tu
me blesses
au bord de tes lèvres
le phrasé de ton dos
terre sur vers l’île sur mer
tu lèves ou tu tournes
emportée exclamée
ce corps mort qui vit en
dos & devant c'est mon ombre
tu es cris
plus que l'ombre pour vivre
et ramasser une sandale et
tu pars où si je disparais pour
le pays des ombres quelle lumière
t'attire et quel ciel quelle voix
erre-air
c’est double signature pour un seul poème
quelles doubles vies
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