vendredi 29 août 2014

Nous sautons la haie de la maison pour plonger dans la lumière

en visitant le Mauritshuis à La Haye, été 2014

(de loin)
il suffit de faire face mais si
la lumière coupe
tenir le front sous la poudre
comme si les cheveux auréolaient
le cou blanc
et son reflet dans la masse
noire qui porte
un oui fort de peinture de face
(de près)
les lèvres disent comme
les yeux tout un port tenu
l’intelligence frontale et l’épaisseur
blanche du col
comme une émergence où
la peinture recommence
il entend bien d’un lobe fin protégé
par les boucles soyeuses

                 (Rembrandt, Autoportrait de 1629)

un panache avec un léger
regard arrière droit sur le regardeur
mais c’est
lui et la boucle d’oreille qui écoute
le reflet au col luisant jusqu’à
l’ombre tout
s’entend sa bouche murmure
la peinture continuée

                (Rembrandt, Tronie of a Man with a Feathered Beret, 1635-1640)


elle a peur dans le déséquilibre et sent
ou c’est le linge qui se froisse
et la peau suit ses plis
dans la fraîcheur d’une nudité
retenue en pleine lumière
comme la main ou
la courbe
de l’ombre sur son dos il voit tout
ce qu’elle cache

               (Rembrandt, Suzanne, 1636)


la lumière s’apaise même si
le front brille
quand les yeux fatigués
laissent la bouche
sourire en coin il fait
face avec toute sa force
sachant bien qu’il peut décliner
tous les gris

             (Rembrandt, Autoportrait, 1669)


il est pris mais
à quoi si son chant
nous regarde comme
l’éclat du mur
alors les rondeurs dorées
arrondissent les rémiges
qui crient
le vol libre

            (Fabritius, Le chardonneret, 1634)

elle nous invite à
les manger ses huîtres
des deux mains
avec ses deux yeux qui
tournent comme ses boucles
et le vin blanc lui donne
des lèvres sourire en coin
avec tout le corps sous l’étoffe
rouge
bordée de fourrure blanche
comme si ouverte
la perle était passée dans notre bouche
par nos yeux

           (Jan Steeen, L’ouvreuse d’huitres, 1658-1660)

si le petit pan de mur jaune
fait le toit il ne peut
que s’entourer d’ombres étranges tombées
du ciel
ou c’est la confusion des eaux
sur les briques et tuiles
et encore ardoises qui creusent
la vision du calme matin
bonjour monsieur Vermeer
levé si tôt pour survoir
un ciel
dans un pan

les ombres donc grandissent
ou s’intensifie le foyer des toits du clocher
c’est lui qui voudrait rythmer
quand le jeu des nuages emporte
tous les toits et fixent un pan
quelques larmes jaunes
entre deux ardoises
d’un bleu noirci


              (Vermeer, Vue de Delft)

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